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01

Février

2023

La retraite aux lambeaux

Madame, Monsieur, chers clients,

Alors que le gouvernement et la droite affirment que la réforme des retraites est indispensable pour sauver un régime durablement en déficit, les opposants et la gauche soutiennent que le système est financièrement sain. Alors qui a raison ?

Le dernier rapport annuel du COR (conseil d’orientation des retraites) décrit un régime excédentaire en 2021 et 2022… mais qui va se dégrader ensuite pour de longues années. Autant dire que les politiciens y puisent les arguments qui les arrangent. D’autant qu’ils mélangent allègrement régimes de base, complémentaires et spéciaux.
Si la forte reprise économique post-covid donne du grain à moudre à ceux qui pensent qu’une croissance soutenue pourrait résoudre le problème des retraites, la dure réalité démographique est là : le système français par répartition dépend du rapport entre les actifs et les retraites.

Politiciens et syndicats raisonnent comme si la retraite était un simple budget dont les sources de financement sont multiples. Mais en France, le système de retraite repose sur le principe de répartition et de solidarité entre les générations. Les cotisations des actifs actuels paient les pensions de retraite des retraités actuels. Et lorsqu’un actif devient à son tour retraité, sa pension est financée par les cotisations des autres actifs.

Lorsqu’il a été mis en place au sortir de la seconde guerre mondiale, il s’agissait d’assurer les retraites de ceux qui n'avaient pas pu épargner. Il y avait alors 4 actifs pour un retraité. D’ici 20 ans, il n’y aura plus que 1,3 actifs pour 1 retraité : penser qu’il ne faudrait pas toucher au système actuel est un acte d’égoïsme envers les générations futures.
Comment serait-il possible de conserver en France un système par répartition avec âge légal de départ en retraite à 62 ans, voire 60 ans, quand tous les autres pays qui ont adopté ce même système prévoient un départ à 64 ans minimum ? Serions-nous plus intelligents dans nos calculs de répartition ? Ferions-nous plus d’enfants susceptibles de payer les futures retraites ?


Les détracteurs de la réforme jouent sur la corde sensible de l’injustice sociale (métiers pénibles, moindre durée de vie en bonne santé, petites retraites…). Bien sûr que personne ne souhaite être obligé de travailler plus longtemps, mais quelles sont les solutions pour payer une masse de retraites toujours plus importante ? Augmenter les cotisations des actifs ou créer de nouvelles taxes ? N’est-ce pas déjà le principe des régimes spéciaux que d’aucuns considèrent comme une injustice corporatiste ?

Si l’on veut conserver le système par répartition, déplacer le curseur de l’âge de départ est le moyen le moins injuste entre les générations. Mais même ainsi il est illusoire de penser pouvoir le sauver : en allongeant la durée de cotisation de deux ans et en réduisant la durée de la retraite d’autant, on ne fait que repousser le problème de la démographie de quelques années.
Dès lors, quitte à dénaturer le système par répartition comme le prônent les détracteurs et remettre un peu de cohérence dans l’enchevêtrement des 40 régimes de retraites qui coexistent en France, pourquoi ne pas envisager d’autres solutions, individuelles celles-là ?

Mais en France, pays de la solidarité et de l’assistanat, on n’ose même pas en parler. Et on se contente d’un système de retraite qui peu à peu part en lambeaux…

Bien à vous,

Philippe Paris
"Penser sans n'être qu'un penseur" 


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