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05
Avril
2023
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Madame, Monsieur, chers clients,
Sans doute avez-vous entendu ces derniers mois deux discours opposés pour décrire l’effet de l’inflation sur l’immobilier. Tantôt on vous explique que l’immobilier est un « rempart » contre l’inflation. Tantôt vous lisez que l’immobilier souffre de l’augmentation des taux d’intérêts, corollaire de l’inflation. Que se cache-t-il derrière cette apparente contradiction ?
Lorsque vous percevez des revenus immobiliers, ils sont en principe indexés sur l’inflation. La notion de rempart est donc évidente : quand les prix augmentent, les loyers perçus augmentent en même temps. Si un bien de 100.000 € vous rapporte 3.000 € de loyer annuel, une inflation de 5% fait passer le loyer à 3.150 €.
Mais l’augmentation des taux qui accompagne l’inflation a des conséquences tout autres. Déjà on comprend que le relèvement des taux d’intérêts des emprunts bancaires renchérit le coût de ces derniers. Compte tenu également du seuil d’usure déjà évoqué ici, il devient plus difficile d’emprunter pour les acquéreurs potentiels. Le marché immobilier s’en trouve freiné.
Mais l’impact le plus important est ailleurs. Imaginez que vous ayez un capital de 100.000 € à placer. Choisiriez-vous d’acquérir le bien immobilier évoqué plus haut, qui va vous rapporter 3.000 €, donc un rendement de 3%, dont il faudra retirer charges et impôts et avec les risques inhérents à l’immobilier locatif ? Ou les mettriez-vous sur un livret A, un compte à terme, une SICAV monétaire ou tout autre placement non risqué qui va vous rapporter 3% également ?
Certes le rempart de l’indexation va faire passer le rendement immobilier à 3,15%. Mais cela ne change pas le raisonnement pour autant. De fait, les investisseurs avertis ne se décident à investir dans l’immobilier que si ce dernier leur rapporte plus que les placements sans risque : c’est ce qu‘on appelle la « prime de risque ». Avec des livrets et autres placements sans risque rémunérés autour de 0% ces dernières années, le rendement de 3% du bien immobilier représentait une prime de risque de ce même pourcentage. Cela tombe bien : 3% est le niveau de prime historique du marché immobilier locatif.
Mais pour que ce dernier reste compétitif aujourd’hui et offre aux investisseurs une prime de risque reconstituée de 3% par rapport aux placements sans risque qui rapportent déjà 3%, il faut que les loyers affichent un rendement de 3 + 3 = 6%. Or, on l’a vu, l’inflation de 5% fait passer le rendement de 3% à 3,15% : on en est donc très loin. Et comme il est difficile de revaloriser les loyers au-delà de leurs index, c’est une pure règle de trois : pour que le loyer de 3.150 € représente 6% de rendement, il faudrait que le prix de votre bien valorisé à 100.000 € tombe à… 52.500 € !
C’est aujourd’hui le danger que fait peser l’inflation sur la valorisation des biens immobiliers. Il faut le savoir. Fort heureusement, en France, beaucoup d’acquéreurs potentiels ne sont pas des investisseurs avertis et achètent des biens en pensant naïvement que la valeur de la pierre ne fait qu’augmenter. Cela devrait éviter la catastrophe à court terme. Mais les arbres ne grimpent pas jusqu’au ciel…
De fréquentes périodes inflationnistes pourraient rendre le problème insoluble. Il convient plus que jamais d’être sélectifs sur vos investissements immobiliers locatifs : privilégier ceux qui ont un réel potentiel discriminatoire (emplacement, qualité, coût, respect de l’environnement) ou dont le rendement est supérieur (location meublée non professionnelle).
Le rempart contre l’inflation des loyers indexés semble bien fragile pour préserver la valeur de votre patrimoine immobilier. Il ne faut pas l’oublier.
Bien à vous,
Philippe Paris
"Penser sans n'être qu'un penseur"
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