Pour tout l’or du monde

Madame, Monsieur, chers clients,

En cette période économique difficile, on entend et on lit que l’or est une valeur refuge. Il protégerait votre épargne de l’inflation et résisterait lors d’une crise financière. L’idée qui vous a forcément traversé l’esprit de stocker des lingots et des louis d’or est-elle donc sensée ?

A ce jour, c’est au total environ 200.000 tonnes d’or qui ont été extraites dans le monde. Compte tenu de la densité de l’or, cela correspond à un cube de 22 mètres d’arrête. C’est par exemple l’équivalent du volume de l’Hôtel de Région à Montpellier. Autant dire une quantité très limitée.

Si pour se protéger, chaque français pouvait se procurer 3 lingots d’or de 1 kg (valeur globalement équivalente à un petit appartement), il n’en resterait plus un gramme sur terre pour les autres habitants de la planète ! Et si c’est tous les humains qui voulaient se protéger, chacun ne pourrait mettre la main que sur 3 louis d’or (environ 1.000 €).

Bref, vous aurez compris que ce n’est pas l’or physique qui préserverait l’humanité d’une débâcle financière majeure. Au mieux – devrais-je dire au pire – cela permettrait à quelques privilégiés de subvenir à leurs besoins dans une humanité miséreuse.

Du reste, l’or fait l’objet d’une intense spéculation. Il existe de nombreux produits dérivés fondés sur la valeur de l’or qui se négocient comme tout autre actif financier. Loin d’être le long fleuve tranquille qu’on imagine, le cours de l’once d’or connait régulièrement des chutes vertigineuses : -30% entre 2012 et 2015 ou encore -20% en 2020 durant la crise Covid qu’il n’a pas su enrailler. Et depuis, ce cours reste toujours très volatile.

En termes de fiscalité, l’or physique est taxable à la succession au même titre que les autres biens du patrimoine. Du coup, comme un lingot ou une pièce sont plus faciles à dissimuler qu’un immeuble ou un compte bancaire, il est tentant de ne pas les inclure dans la succession et de se les transmettre de main en main.

Oui mais voilà : la fiscalité à la revente peut être pénalisante. Puisque l’on a le choix entre se voir appliquer la taxe forfaitaire sur les objets précieux (11,5% sur le montant brut de la vente) ou le régime de droit commun des plus–values de cession : la plus-value imposable (à 19% + 17,2% de prélèvement sociaux) est alors diminuée d'un abattement de 5% par année de détention au-delà de la deuxième année, ce qui aboutit à une exonération complète au bout de 22 ans. Encore faut-il pouvoir prouver la date et le prix d’achat…

Loin d’être une occasion éponyme, l’or est un investissement à considérer comme tout autre. Le bon sens est de n’y consacrer qu’une partie de son patrimoine, histoire de le diversifier : pas plus de 5%. C’est du reste ce que font la plupart des gérants des fonds patrimoniaux qu’il y a au sein de vos contrats d’assurance-vie.

Au plaisir de se retrouver à la rentée…

Philippe Paris

"Penser sans n'être qu'un penseur"

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