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03

Mai

2023

Un bon arrangement…

Madame, Monsieur, chers clients,

Traditionnellement, l’« arrangement familial » est le surnom que l’on donnait dans les campagnes à la donation-partage au moment de pérenniser l’exploitation agricole. Aujourd’hui, le terme désigne plus généralement l’entente de la famille en vue du partage entre les enfants du patrimoine appartenant aux parents. Mais on va voir que cet arrangement peut prendre plusieurs formes, et que très souvent il est trop tard lorsque les familles décident de s’en préoccuper.

Lorsque rien n’a été prévu pour une succession, tous les biens sont individuellement partagés par parts égales entre les héritiers. Outre un éventuel démembrement avec le conjoint survivant après le premier décès, il en résulte entre eux une indivision à l’issue des deux successions. S’il y a 3 biens immobiliers et 3 enfants, chacun des 3 biens appartient pour un tiers à chacun des enfants.

La propriété en indivision est à la fois précaire et rigide. Précaire car chacun peut en sortir et provoquer le partage quand il le souhaite. Rigide car il faut l’unanimité pour vendre le bien.

C’est de l’opération civile du « partage » que va résulter la répartition individuelle de chaque bien du patrimoine. Si ce dernier est important, les conflits vont naître lorsque la situation n’a pas été anticipée. De nombreuses successions restent en standby de longues années lorsque les héritiers n’arrivent pas à s’entendre sur la répartition ou la valorisation des biens.

C’est malheureusement à ce moment-là, lorsqu’il est trop tard, que les héritiers sont sensibilisés à cette notion d’arrangement. Celui-ci se limitera à des concessions que feront certains sur le patrimoine qu’ils accepteront, mais qui les rendront amers vis-à-vis des héritiers leur paraissant mieux lotis. On connait tous des familles qui se sont déchirées pour cette raison.

C’est donc bien avant le décès que doit s’envisager cet arrangement. S’il peut résulter d’une conciliation familiale, ce sont les parents, propriétaires du patrimoine, qui ont la main pour répartir celui-ci entre les héritiers.

Soit au moyen d’une donation-partage : dans ce cas les parents se dessaisissent immédiatement et irrévocablement de leurs biens au profit des donataires. L’acte n’est pas anodin et doit être mûrement réfléchi mais il a beaucoup d’atouts en terme d’équité de répartition du patrimoine. Attention toutefois aux donations simples qui ne vont souvent qu’embrouiller la situation au moment du partage. 

Soit au moyen d’un testament-partage : auquel cas le parent prend ses dispositions pour qu’à son décès la répartition des biens s’impose à ses enfants. Curieusement, c’est un outil peu usité par les notaires, qui préfèrent multiplier les testaments classiques, quitte à créer parfois des complications dans les familles au moment de leur application.

Mais attention : le parent ne peut donner ou léguer que ce dont il a la disposition. Ce qui signifie que ces actes d’arrangement sont impossibles lorsqu’il ne subsiste qu’un époux survivant. Car l’issue de la première succession entraîne une propriété déjà partagée entre ce dernier et les héritiers, en indivision ou en démembrement. Il ne peut donc disposer librement d’un bien qu’il ne lui appartient pas à lui seul.

On l’aura compris : c’est du vivant des deux parents qu’il faut procéder à l’« arrangement ». Au-delà du premier décès, cela n’a plus d’autre impact que de chercher des solutions conciliantes à une situation qui risque de déboucher sur la discorde entre les héritiers.

En matière de succession aussi, un bon arrangement vaut mieux qu’un mauvais procès…

Bien à vous,


 

Philippe Paris

"Penser sans n'être qu'un penseur"


 


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